Que penser du Snoezelen en gérontologie ?

Que penser du Snoezelen en gérontologie ?

« Snoezelen », ce mot aux consonances scandinaves s’est fait un nom dans le paysage gérontologique au cours de ces dix dernières années. Cet article vise à présenter cette approche non-médicamenteuse aux apparences psychédéliques en vous proposant un tour d’horizon des publications scientifiques.

Développé dans les années 1970 par deux jeunes Hollandais (Ad Verhuel et J. Hulsegge) le terme  « Snoezelen »  est la contraction de Snueffelen (renifler, sentir) et de doezelen (somnoler), néologisme évoquant la notion d’exploration sensorielle, de détente et plaisir. Apparu d’abord dans le cadre du handicap et du polyhandicap, il est aujourd’hui présent dans le secteur de la gérontologie. Son objectif est de créer un environnement qui ouvre à des sollicitations sensorielles générant plaisir et détente se déclinant sous différentes formes (salles, chariots, parcours, ambiances sensorielles). De nombreuses structures se sont dotés en salle « Snoezelen » dans l’optique d’apaiser des comportements difficiles, mais après des mois voire des années les effets observés sont-ils concluant ? Ces salles sont-elles utilisées autant que prévues ou servent-elles d’attraction commerciales ?

 A l’heure actuelle les études évaluant significativement les bienfaits  du « snoezelen » auprès de personnes âgées restent encore rares, néanmoins quelques études dégagent des tendances positives sur différents versant.

Sur le plan physiologique : Bailly & Pointereau en 2011 ont observé sur dix-huit femmes atteintes de démences une diminution de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle juste après les séances ce qui révèle un apaisement des participantes procuré par les séances.

Sur le plan psychocomportemental : Andreeva et al., 2011 ont mis en évidence une réduction de l’agitation, de l’agressivité verbale et/ou physique et de l’anxiété pour trois des quatre personnes patients Alzheimer accompagnés pendant un mois. Cette étude dégage une observation intéressante quant à l’intérêt d’une stimulation sensorielle réalisée avant la toilette dans un climat apaisant. Mais cela nécessite une organisation particulière des toilettes étant donné que « le snoezelen » s’ajoute à un temps de toilettes souvent contraints à une réalité temporelle serrée.

Une autre étude comportementale comparative réalisée par Van Weert et al. en 2005 en unités de psychogériatrie aux Pays-Bas relève des bienfaits. 250 enregistrements vidéo de situations de soins ont été effectués et analysés au départ et 18 mois après « Snoezelen ».

Une augmentation significative du regard portée vers le résident, du toucher affectif, du nombre de sourire et d’échange verbal est constaté chez les personnes ayant suivi les séances « Snoezelen ». En ce qui concerne les résidents, un effet significatif du traitement a été trouvé sur le nombre de sourire, de regard dirigé vers le soignant, sur le sentiment d’autonomie verbalisé et sur la diminution de la colère et des réprobations. Cette étude montre que la mise en œuvre de l’approche Snoezelen a amélioré la communication réelle pendant les soins du matin, néanmoins cette étude précise que les soins des personnes formées prennent plus de temps suggérant un investissement de temps peut être nécessaire pour obtenir des effets positifs sur la communication soignant- résident.

Depuis 2001 plus de 70 études scientifiques ont été réalisées sur l’impact du « Snoezelen » auprès de personnes âgées « démentes ». La tendance générale qui se dégage de l’ensemble de ces études est un effet intéressant à court terme sur la diminution des troubles du comportement. Cependant des études plus importantes sont nécessaires pour confirmer l’efficacité clinique de cette thérapie auprès de personnes malades Alzheimer ou malades apparentées.

En conclusion

Plébiscité par certaines structures  par les effets obtenus auprès de certains résidents, critiqué par d’autres pour son rapport entre l’investissement financier et sa fréquence d’utilisation, le concept « snoezelen » fait partie intégrante des approches non-médicamenteuses reconnues. La littérature scientifique relate un intérêt sur le plan comportemental à court terme à partir du moment où l’espace est utilisé en connaissance de cause, par du personnel formé et ayant un temps spécifique pour son utilisation. Mais ces conditions sinequanone ne sont pas toujours aisées à réunir en EHPAD et c’est là que le bât blesse.

Guy Le Charpentier
Directeur des formations ScenéSens
Ingénieur en réadaptation
 
Sources

ISNA, Association international Snoezelen : http://isna.fr/

Effets Snoezelen sur des personnes âgées démentes Bailly & Pointereau, 2011 NPG Neurologie – Psychiatrie – Gériatrie. Volume 11, Issue 66, December 2011, Pages 268–273

« Snoezelen » ou les effets de la stimulation multisensorielle sur les troubles du comportement chez les personnes âgées démentes à un stade avancé V. Andreeva, V. Dartinet-Chalmey, A. Kloul, B. Fromage, N. Kadri. NPG Neurologie – Psychiatrie – Gériatrie. Volume 11, Issue 61, February 2011, Pages 24–29

Effects of snoezelen, integrated in 24 h dementia care, on nurse–patient communication during morning care Julia C.M. van Weert, Alexandra M. van Dulmen, Peter M.M. Spreeuwenberg, Miel W. Ribbe, Jozien M. Bensing Patient Education and Counseling Volume 58, Issue 3, September 2005, Pages 312–326

Intervención en demencias mediante estimulación multisensorial (snoezelen) Andrés López-Almela, Antonia Gómez-Conesa Fisioterapia Volume 33, Issue 2, March–April 2011, Pages 79–88

Thérapies non médicamenteuses : le banc d’essai E. Lécadieu & P. Laurent MMR n°162, juin-juillet 2013, Pages 12-19